TAP auditorium
6 rue de la Marne 86000 Poitiers

Présentation

Depuis que l’approche comportementale est devenue dominante en psychiatrie, la notion d’addiction a pris une ampleur considérable. Une nouvelle discipline a d’ailleurs été créée – l’addictologie – pour désigner un domaine de recherches visant à appréhender l’ensemble des comportements humains. On parlait autrefois de drogues ou de toxicomanie, on parle désormais de dépendance : alcoolisme, tabagisme, boulimie, anorexie. Mais du coup, on s’est mis à désigner comme des pathologies des pratiques qui n’en relèvent pas et pour lesquelles on a inventé des mots dignes de la médecine de Molière : sexomanie, dépendance aux écrans et aux jeux vidéo, collectionnisme, oniomanie (fièvre acheteuse), bigorexie (manie du sport), tanorexie (bronzomanie), etc. Pourquoi ne pas ajouter à cet ensemble l’addiction à la lecture, à l’écriture ou à la culture ? Et pourquoine dirait-on pas que le médecin addictologue est lui-même atteint d’une compulsion à dépister des addictions qui n’en sont pas ? Tout usage d’un plaisir risque désormais de passer pour une véritable maladie mentale que l’on traite d’ailleurs par la prise de drogues (psychotropes). Il y a donc un « archipel des dépendances » à l’intérieur duquel se trouvent réunies de véritables pratiques de destruction de soi et des autres et des manières de vivre. Mais où se trouve la frontière entre une volonté forcenée de se nuire et la recherche d’une « autre existence », caractérisée par des excès ou des bizarreries qui résistent à la normalisation sans pour autant nuire à autrui ? On se demandera donc comment nos sociétés individualistes et libérales ont pu mettre en place un système sécuritaire visant à restreindre l’expression transgressive d’une liberté singulière qui, fût-elle dangereuse pour le sujet, n’entrave pas forcément l’exercice des autres libertés.

Horaires / lieux

Spectacle archivé.

Biographie

Élisabeth Roudinesco est directrice de recherches (HDR) au département d’histoire de l’Université de Paris VII où elle dirige des thèses depuis vingt ans. Son séminaire sur l’histoire de la psychanalyse est rattaché au département d’histoire de l’École normale supérieure (ENS). Elle a été membre de l’École freudienne de Paris (1969-1981) fondée par Jacques Lacan où elle a reçu sa formation psychanalytique. Elle a publié des dizaines d’articles, de conférences et de préfaces, ainsi qu’une vingtaine d’ouvrages traduits dans le monde entier. Parmi eux, une Histoire de la psychanalyse en France  (2 volumes) une biographie de Jacques Lacan (1 volume), le tout réédité chez Hachette, collection pochothèque, (2009), un Dictionnaire de la psychanalyse en collaboration avec Michel Plon (5e rééd. pochothèque, 2017), un dialogue avec Jacques Derrida, De quoi demain… (Fayard, 2001), Sigmund Freud en son temps et dans le nôtre (Seuil, 2014), Dictionnaire amoureux de la psychanalyse, (2017, Plon/Seuil). Elle est présidente de la Société internationale d’histoire de la psychiatrie et de la psychanalyse (SIHPP), depuis 2007, chroniqueur au Monde des livres depuis 1996, membre du comité scientifique de la revue History of Psychiatry et de la revue Cliniques méditerranéennes, depuis 2003.

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